Conférence des Tables régionales de concertation des aînés du Québec (CTRCAQ)

200, rue Commerciale, bur. 202
Donnacona (QC)
G3M 1W1
418-283-4452
info@conferencedestables.org

Tags

Québec balise l'aide médicale à mourir

13/06/2013 10:08

13 juin 2013 | Amélie Daoust-Boisvert | Santé

Les défenseurs de l’aide médicale à mourir atteints d’une maladie dégénérative auraient trouvé une écoute dans le cadre de la nouvelle loi, a précisé la ministre Hivon en entrevue avec Le Devoir. Mais seulement au moment où la fin aurait été proche. « Il faudrait être au dernier stade, terminal, d’une telle maladie, avec des souffrances constances et inapaisables. » Photo : Jacques Nadeau - Le DevoirLes défenseurs de l’aide médicale à mourir atteints d’une maladie dégénérative auraient trouvé une écoute dans le cadre de la nouvelle loi, a précisé la ministre Hivon en entrevue avec Le Devoir. Mais seulement au moment où la fin aurait été proche. « Il faudrait être au dernier stade, terminal, d’une telle maladie, avec des souffrances constances et inapaisables. » Consultez le projet de loi n° 52 – Loi concernant les soins de fin de vie

Québec ouvre la porte à l’aide médicale à mourir. Cette option serait limitée aux personnes majeures, aptes à consentir aux soins, atteintes d’une maladie grave et incurable qui provoque des souffrances constantes et insupportables à un stade où le déclin est « avancé et irréversible ».

Le projet de loi 52 marque aussi un autre tournant. Intitulé Loi concernant les soins de fin de vie, il introduit l’obligation de fournir des soins de fin de vie « respectueux de la dignité et de l’autonomie » des personnes mourantes. Ce respect de l’autonomie va jusqu’à l’aide médicale à mourir, mais comprend aussi tout le continuum des soins palliatifs et la sédation terminale. Il oblige les établissements de santé à procurer les soins, entre leurs murs ou à domicile. Ces derniers devraient aussi mettre à la disposition des mourants une chambre qu’ils seraient seuls à occuper.

Les médecins pourront refuser de donner la mort en raison de leurs convictions personnelles, mais les établissements devraient alors trouver un praticien pouvant consentir au souhait du patient. Tout cas devrait être évalué par deux médecins.


Selon cette première mouture du projet de loi, il ne serait pas possible de signifier son désir de recevoir l’aide médicale à mourir à l’avance. Le projet balise les directives médicales anticipées, lesquelles « peuvent tout aborder, mais pas l’aide médicale à mourir, a tenu à spécifier Mme Hivon. La personne en fin de vie doit pouvoir la demander de façon immédiate et répétée, ce qui fait en sorte qu’on exclut une personne qui ne serait plus apte ». Pour le moment, car Québec attend un important avis d’un comité chapeauté par le Collège des médecins à ce sujet. Il sera déposé à temps pour que la question soit débattue dans le cadre des consultations, prévues à l’automne.


Les défenseurs de l’aide médicale à mourir atteints d’une maladie dégénérative comme Sue Rodriguez auraient trouvé une écoute dans le cadre de la nouvelle loi, a précisé la ministre Hivon en entrevue avec Le Devoir. Mais seulement au moment où la fin aurait été proche. « Il faudrait être au dernier stade, terminal, d’une telle maladie, avec des souffrances constances et inapaisables. »
 

Une nouvelle Commission sur les soins de fin de vie serait chargée de surveiller l’application de la loi.
 

Selon Mme Hivon, dans les pays où l’aide médicale à mourir se pratique, moins de 1 % des mourants la demandent.

 

Un débat à plusieurs niveaux

 

Le Barreau, les établissements, les fédérations médicales, des ordres professionnels… Le projet de loi a été accueilli assez positivement. Les partis de l’opposition se sont montrés favorables. Le chef libéral, Philippe Couillard, a indiqué que ses députés seraient libres de voter « selon leur conscience ». François Legault n’a pas encore tranché cette question. Québec solidaire a salué le projet de loi.
 

Le Collège des médecins voit dans ce projet de loi un « message très important », dit son secrétaire, le Dr Yves Robert. « On dit qu’on a l’obligation d’offrir des soins de fin de vie, que tant que ce n’est pas fini, on doit donner des soins de qualité. » Et cela comprend la possibilité de mourir à domicile. « Beaucoup plus de gens vont demander les soins palliatifs à domicile plutôt que l’aide médicale à mourir », selon le Dr Robert.
 

En ce qui concerne l’aspect légal, Véronique Hivon est apparue confiante devant les journalistes : « Ce projet de loi est fondé sur nos compétences en matière de santé. Il tient la route et a des assises juridiques solides. »
 

L’avocat Jean-Pierre Ménard, coauteur il y a quelques mois du rapport du comité de juristes experts sur le sujet, dont le projet de loi s’inspire en partie, est d’accord avec Mme Hivon. « Les assises constitutionnelles de cette loi m’apparaissent très fortes à l’égard du champ de compétences provincial de légiférer sur les soins de fin de vie », tranche-t-il.
 

La ministre Hivon croit même qu’il ne serait pas nécessaire de donner des directives au directeur québécois des poursuites criminelles et pénales pour éviter que des médecins soient poursuivis. « Le projet de loi est complet en lui-même, confirme son collègue de la Justice, Bertrand St-Arnaud. Je ne ferme pas la porte [à une directive] si ça peut rassurer le personnel médical, mais on est loin d’être rendus là. »
 

À Ottawa, le ministre de la Justice, Rob Nicholson, a tenu à rappeler que « les lois qui interdisent l’euthanasie et le suicide assisté existent pour protéger tous les Canadiens ». En 2012, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a déclaré ces lois inconstitutionnelles. Ottawa a interjeté appel, une procédure toujours pendante.

 

Des voix discordantes

 

Reste que les opposants n’ont pas l’intention de se taire. « On a appelé ça de l’aide médicale à mourir, ça passe mieux, mais c’est de l’euthanasie qu’il est question », a déploré le Dr Marc Beauchamp, chirurgien orthopédiste et membre fondateur du collectif de médecins Refus médical de l’euthanasie, dans un point de presse orchestré à Montréal. Avec le réseau citoyen Vivre dans la dignité, le groupe dénonce la révolution que constitue le fait d’inscrire dans un projet de loi la permission d’euthanasier une personne « par fausse compassion ». « Provoquer volontairement la mort d’une personne, on dira ce qu’on voudra, c’est un homicide », a dit le Dr Beauchamp, qui s’interroge avec les autres membres sur la contradiction de ce projet avec le Code criminel, de compétence fédérale.
 

« Quand est-ce que la compassion devient de la démission ? » En posant cette question, l’ancien doyen de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, le Dr Patrick Vinay, souhaite que la réflexion s’amorce sur les « trous » qui subsistent dans ce projet de loi.

Avec Marie-Andrée Chouinard

 ***


Lexique

 

Soins de fin de vie


Soins palliatifs offerts aux personnes en fin de vie, y compris la sédation palliative terminale, de même que l’aide médicale à mourir.

 

Aide médicale à mourir

 

Fait pour un professionnel de la santé de fournir un service médical, qu’il s’agisse de soins ou de toute autre intervention, dans le but d’aider son patient à mourir dans des conditions strictes, à la demande de ce dernier.

 

Directives médicales anticipées

 

Instructions que donne une personne apte, par écrit ou autrement, sur les décisions à prendre en matière de soins dans l’éventualité où elle ne serait plus en mesure de les prendre elle-même.

 

Sédation palliative terminale

 

Administration d’une médication à une personne, de façon continue, dans le but de soulager sa douleur en la rendant inconsciente jusqu’à son décès.

Source: Le Devoir

 

Conférence des Tables régionales de concertation des aînés du Québec